Les Pieds - noirs


...ou la fierté des vaincus qui n'ont pas mérité la défaite.









Selon le Petit Robert, le terme « Pied-Noir », utilisé comme substantif ou adjectif, désigne familièrement les « Français d'Algérie », rapatriés en France à partir de 1962.
Dans l'usage courant, « Pied-Noir » est un quasi synonyme de « rapatrié ».
Toutefois, ces deux termes ne recouvrent pas la même réalité. C’est ainsi qu’on a pu entendre sur des chaines nationales françaises, lors des évènements en côte d’Ivoire en 2006, parler des rapatriés. Rapatriés veut dire réintégrer la patrie. Pour nous pieds-noirs, nous étions dans des départements français à l’époque, rien de comparable avec la situation de ces gens qui étaient en Côte d’Ivoire pour un tout autre but que celui de garder une terre française…(c’était une petite parenthèse). Rappelons que le terme était plus approprié à désigner des Français qui rentraient de départements français…

« Rapatrié » fait référence à un statut administratif qui a concerné, à partir de 1962, essentiellement les Français repliés d'Algérie au moment de l'indépendance, puis qui a été étendu à d'autres populations venant du Maroc et de Tunisie, voire d'anciennes colonies françaises. .
Parmi les rapatriés d'Algérie, qui étaient tous de nationalité française, on englobe les musulmans, plus souvent désignés par le terme de harkis, c'est-à-dire ceux des militaires, anciens supplétifs de l'armée française, et leurs familles qui ont pu trouver refuge en France, et les non-musulmans, soit d'origine européenne, soit de la communauté juive locale.
« Pieds-Noirs » s'applique plus précisément à ces deux dernières catégories.

L'apparition de ce terme pour désigner les Français d'Algérie serait datée de 1955.

La « petite histoire » dit que ce terme aurait déjà été en usage vers 1951-1952, dans les casernes en métropole, bien avant de parvenir en Algérie, pour désigner les recrues françaises originaires d'Afrique du Nord. Il n'y avait en Algérie, avant la guerre d'indépendance, aucun sobriquet pour désigner les Français d'Algérie eux-mêmes, si ce n'est les appellations courantes d' « Algériens » ou de « Nord-Africains », désignant alors seuls les Français d'Algérie ou d'Afrique du Nord, alors que les indigènes étaient désignés comme « Arabes », ou « musulmans ».

Les Français d'Algérie, au contraire, utilisaient de leur côté plusieurs surnoms pour désigner les Français de Métropole ("Frankaoui", " Patos" ) ou les Indigènes.

Le surnom de « pieds-noirs » semble n'être parvenu en Afrique du Nord, qu'après 1954, peut-être apporté par les soldats métropolitains venus en nombre. Toutefois son usage ne s'est vraiment répandu en Algérie que dans les toutes dernières années de la présence française et surtout en France, après le rapatriement. Quoi qu'il en soit, les premières attestations certaines de ce terme, dans cette acception, sont à ce jour les suivantes :
-en 1957, dans un roman de Georges Damitio intitulé les Pieds-Noirs, publié par les éditions Albin Michel ;
-en juin 1960, dans le « Bloc-Notes » de François Mauriac dans l'Express ;
-en septembre 1961, dans une étude intitulée « les Pieds-Noirs » parue dans La Revue des Deux Mondes.

D’autres versions :



Des explications plus ou moins crédibles, probablement imaginées après coup, ont alors été avancées: allusion aux souliers supposés vernis ou aux bottes noires des premiers immigrants ou aux brodequins noirs des soldats de l'armée d'Afrique, aux jambes des colons, noircies en défrichant les marécages, etc. Certains évoquent même les Indiens Pieds-Noirs (Black-Feet) d'Amérique, qui auraient été présents dans les contingents américains qui débarquèrent en Afrique du Nord en 1942. Toutes ces explications sont probablement fausses puisque, si elles étaient vraies, la dénomination de « Pieds-Noirs » aurait été connue en Algérie, bien avant la guerre d'indépendance.

Selon d'autres attestations exprimées elles aussi après coup, le terme aurait désigné, vers 1901, des Arabes, chauffeurs sur les bateaux à vapeur traversant la Méditerranée. Selon un article récent « Vous avez dit Pieds-Noirs », paru dans le magazine Pieds Noirs d'Hier et d'Aujourd'hui de janvier 1999, on explicite l'origine de ce sobriquet utilisé dans le jargon de la marine, mécanisée dès la fin du XIXe siècle : les marins d'Algérie habitués aux températures torrides auraient été affectés aux machines à charbon, comme les « gueules noires » des mines, tandis que les marins métropolitains, armés de l'écouvillon pour graisser les canons, se seraient vu baptiser bouchons gras puis à terme : les "patos" de l'espagnol « canard », à cause de leur démarche chaloupée acquise sur le pont par suite du roulis. Une photographie de 1917, portant cette mention, y est insérée. Cette dernière explication est peut-être valable pour le mot « patos », très utilisé sur place avant 1949, mais vraisemblablement pas pour le terme « Pied-Noir » qui était rigoureusement inconnu à Alger jusqu'en 1954.

Désignant les Français d'Algérie, cette appellation a pris, dès 1958, une nette connotation péjorative en métropole, notamment sous la plume de François Mauriac. Mais alors, les intéressés eux-mêmes, à l'heure où leur destin était menacé, s'en sont saisi, pour en faire l'étendard de leur identité, comme en témoignent les noms de nombreuses associations.

Mais au fait, qui étaient les pieds-noirs ?



Les Pieds-Noirs d'Algérie représentaient au moment de l'indépendance une population d'environ un million de personnes.

La communauté d'origine européenne résultait du brassement de populations d'origines variées mais à forte dominante méditerranéenne : Français, Espagnols, Italiens, Maltais, mais aussi Allemands et Suisses. S'y ajoutait la communauté juive plus anciennement installée - souvent de souche berbère et dont les origines remontent à la période d'avant la conquête arabe, entièrement acquise à la présence française après le décret Crémieux, et dont elle avait adoptée la culture et les combats, en 1914 et 1939.

Si les immigrés de nationalité française étaient majoritaires, les étrangers formèrent longtemps un pourcentage important de cette population jusqu'à atteindre 49 % en 1886. Après la loi de naturalisation automatique de 1889, leur nombre diminuera rapidement. Cette intégration des Pieds-Noirs, qui n'était pas évidente au début de la colonisation (certains politiciens locaux parlèrent de « péril étranger ») tant les tensions raciales étaient fortes entre les Français et les étrangers européens d'une part, entre les Européens locaux et les Juifs d'autre part, a probablement été favorisée par deux facteurs :

-la politique du gouvernement français qui, inquiet à une certaine époque de voir l'élément français débordé démographiquement, a pris des mesures pour naturaliser de façon automatique les enfants d'étrangers nés sur le sol algérien (lois de 1889 et 1893) et accorder en bloc aux juifs, qui avaient accueilli les Français en libérateurs en 1830 et avaient depuis lors massivement adopté la culture française, le statut de citoyens français (décret Crémieux de 1870).
-le sentiment d'une communauté de destin face à la population indigène musulmane dans un système colonial.

Par contre aucune fusion (ou rarement) ne s'est produite avec les Algériens issus de la culture musulmane alors désignés sous le terme générique de « Français musulmans ». Cela résulte de la barrière de la religion dans une population islamisée de longue date.



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